Vayikra 5773 (par Maayane Meyer)


La paracha de cette semaine entame et intitule le 3° livre de la Torah, le Lévitique ou Livre des Lois mais aussi, peut-on dire, de la communication.

Il y est beaucoup question de parler, dire, d'interpeller, d'échanger, de transmettre, bref d'appeler dans les deux sens du terme : nommer et héler.

Je me suis appuyée sur les commentaires de S. R. Hirsch, de Tamar Schwartz –cette extraordinaire exégète-linguiste qui fait danser et chanter les lettres-, de Y. Leibovitz, d'A. Chouraki et d'E. Munk  eux-mêmes se référant à nos éminents sages tels que Rachi, à ceux des Pirke Abbot, et à ceux des divers midrachim.

"Il appela Moïse". Qui est ce Il ? Qui appelle Moïse ? Il n'est nullement écrit "Hachem, ou Elokhim" appela –ce qui nous aurait certifié l'origine de l'appel. Non, un simple pronom personnel voulant peut-être par là nous ramener à cette base fondamentale du judaïsme à savoir que l'origine nous est et nous sera toujours inconnue, comme le "aleph" primordial dont nos Sages nous disent de ne pas chercher à analyser ni le haut, ni le bas, ni les côtés ; ni l'avant, ni l'après.
C'est un appel de l'Infini, une assignation nous appelant infiniment. Ainsi, à l'instar de Moïse convoqué nommément par Dieu, nous le sommes personnellement chacun dans notre propre subjectivité, lors de l'étude de la Torah, à la fois dans la fierté d'avoir été choisis, désignés par Dieu,  mais aussi, dans une profonde modestie….. car nous ne sommes que brin d'herbe.

Cette double attitude, d'honneur et d'humilité face à un appel, est mise en relief par l'écriture même du Texte : en effet, ce mot "vahikra" comporte, en lettre finale, un "aleph" mais plus petite que les autres lettres. C'est Moïse, raconte-t'on qui, in fine en aurait décidé ainsi : d'une part, il ne peut dénier son  authentique reconnaissance envers Celui qui l'a désiré, désigné mais d'autre part, il ne peut faire violence à sa légendaire modestie face au choix irrévocable de Dieu. Alors, sensible au fait qu'il est  invité par Dieu à venir le rejoindre en l'appelant par son prénom –marque de la proximité existant entre eux-, il accepte une fois de plus sa mission mais la transcrit avec un modeste "aleph".

On voit bien que cette paracha  est placée sous le signe du "rapport", du "rapprochement" entre la transcendance et l'humanité. Que ce soit par la parole ou par l'offrande, le korban –bâti sur les consonnes "kouf/rech/bet", le lien entre le Haut et le Bas s'actualise dans des actes.

Nous sont alors énoncées les lois –très minutieuses- s'appliquant aux "sacrifices", terme français qui traduit mal cette notion de "proximité" dont il est question avec les offrandes apportées dans ce lieu qui deviendra plus tard le Temple et qu'ici, dans le désert, se nomme "Tente d'Assignation", lieu d'où dorénavant la parole divine sera entendue par le seul Moïse,
le plus grand des prophètes afin qu'il la pratique avec justice et surtout, la transmette au peuple.
Car Moïse cette fois-ci se voit confier une mission particulière, celle qui sans doute était contenue dans les deux précédentes : celle de former la nation à sa vocation première,  de faire des bnei Israel, un peuple de prêtres accomplissant  scrupuleusement les rites sacrificiels mais avec pour tache aussi, d'y joindre les offrandes des autres peuples. Car  n'oublions pas, le Temple a valeur universelle : Isaïe : "…leurs holocaustes seront les bienvenus sur mon autel ; car ma main sera nommée Maison de Prières pour toutes les nations".

En outre, il convient de noter, que la voix de Dieu ne se fait pas entendre n'importe où.

Le lieu de la rencontre entre Dieu et l'Adam exige un travail +/- inconscient, +/- maitrisé, +/- ritualisé.  Et même si le lieu est dit "Tente d'Assignation" et donc qu'il est matériel, il faut avoir présent à l'esprit que la Révélation ne peut s'effectuer que si l'Adam est prêt, c'est-à-dire lorsqu' en position de kabala, il reçoit, dans un creux matriciel fécond, la parole divine. Car même si elle parait venir de l'extérieur, d'en haut, la Voix dépend de la place qui lui a été préparée, dans l'intériorité de chacun.  C'est dans cet "entre-deux" semblable à celui qui reliait les deux chérubins protégeant l'Arche d'Alliance, que réside la Révélation, c'est-à-dire l'écoute de l'Autre, de la Transcendance.



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