Metsora 5774 (par Joanna Kubar)

Metzora est une personne atteinte d'une maladie terrible, Tza'arat. Le dernier Shabbat nous avons appris que Tza'arat est une maladie qui se manifeste sur la peau. Elle est donc certainement externe, mais peut être aussi interne, ceci nous ne le savons pas. La médecine contemporaine connaît des maladies dont les symptômes sont en même temps internes et externes; Tza'arat ne correspond pas à ce que nous appelons aujourd'hui la lèpre, nom donné par les anciens aux hasards des développements des connaissance médicales et de la traduction, mais nous savons que c'est une maladie qui se voit.  

Le malade, metzora, est présenté  au prêtre. C'était hier. Aujourd'hui le malade est face au médecin.

Que pouvons nous apprendre de la magie et du pouvoir du prêtre sur le pouvoir et la magie du médecin?

Nous nous souvenons du Shabbat dernier l'examen minutieux auquel le prêtre soumet le malade. Il observe la lésion, la peau qui est autour, il observe diverses parties du corps: la couleur, la texture, la présence des poils, tout est décrit avec le plus grand soin. Cette attention même portée au malade fait certainement, hier comme aujourd'hui, partie du traitement. Enfin le diagnostic est posé. Parfois cela n'est pas chose simple, le processus est parfois long, le prêtre va et vient, il renouvelle plusieurs fois l'observation. Le Metzora, celui qui est atteint de Tza'arat, est isolé pendant sa maladie.

Jusqu'ici le parallèle peut être dessiné facilement entre le processus mené par le prêtre hier, et par le médecin aujourd'hui.

Il advient alors que le Metzora guérit.

Je parle ici de Metzora, patient atteint de la maladie physique et non de Motzi Ra, celui qui sort (motzi) le mal (ra) de sa bouche. Le Motzi ra, le mal disant, le médisant, ressemble à celui qui est atteint d'une maladie grave, disent traditionnellement, depuis des siècles, nos rabbins et nos sages.

Mais contrairement à Metzora, le motzi ra, lui ne guérit jamais! Il est de facto isolé, malade pour la vie, il est coupé de sa communauté, il s'est amputé lui même.

Donc le Metzora est guéri, et c'est en ce moment là qu'il est soumis à un processus long, mystérieux, solennel.

D’abord il ya deux oiseaux : l’un est sacrifié, et l’autre est purifié dans et par le sang du premier. Cet oiseau là est ensuite relâché dans la campagne. Cela nous rappel Azazel ! Le jour de Yom Kippour ! Solennel et mystérieux par excellence.

Mais ce n’est pas tout. Une semaine plus tard, un deuxième rituel prend place, il implique trois sacrifices, deux agneaux et une brebis sont offerts pour s’approcher de Dieu, pour expier la transgression face à la Transcendance et pour expier son impureté.

C’est un processus élaboré, impressionnant. Il ne semble pas avoir de parallèle aujourd’hui. Il nous indique, peut être, que quand le corps est guéri, quand on a paré au plus grave, quand on a écarté le danger vital, il faut continuer à s’occuper de la tête.

La médecine d’aujourd’hui reconnaît les maladies psychosomatiques et les liens complexes entre le cerveau, le système nerveux central et végétatif, le système endocrinien et le système immunitaire sont de plus en plus étudiés, de mieux en mieux connus. Ces connaissances trouvent quelques applications dans le diagnostic et le traitement.

Mais faisons nous aujourd’hui quand le patient est guéri ?

Rien.

Or quand nous sommes malades, non seulement notre corps est atteint, mais aussi notre état psychique est fragilisé, nous sommes vulnérables, habités par la douleur et la peur, pour nous, pour nos proches parfois, nous sommes face à notre finitude.

Alors, peut être pour que la santé soit retrouvée vraiment, entièrement, quand notre corps est guéri il faut prendre le temps à penser à notre esprit, il faut prendre soin de notre tête, il faut prendre le temps pour puiser dans cette expérience difficile qu’est la maladie pour tenter d’y trouver de nouvelles ressources.

C’est ceci que j’ai appris en réfléchissant sur la paracha Matzora