Shabbat Shalom
Au début de la parasha de ce Shabbat - « Vaera », car le récit
commence par le rappel par Dieu à Moshé, qu’il est apparu, va-era, à ses
ancêtres Abraham, Isaac et Jacob - Dieu fait la promesse à Moshé d’adopter le
peuple d’Israël et de le délivrer de l’esclavage : « je vous affranchirai avec un bras étendu, à l’aide de châtiments
terribles. »
Voici le récit des sept premières
plaies:
1) Sur l’ordre de Dieu, Moshé et Aaron
demandent à Pharaon de renvoyer le peuple d’Israël pour qu’il puisse adorer son
Dieu. Le pharaon n’obéit pas.
Dieu ordonne à Moshé et Aaron d’aller
trouver le Pharaon le matin quand il se dirige vers le fleuve, et de changer
les eaux en sang (première plaie).
2) Sur l’ordre de Dieu, Moshé et Aaron
demandent à Pharaon de renvoyer le peuple d’Israël pour qu’il puise adorer son
Dieu. Le pharaon n’obéit pas.
Dieu ordonne à Moshé et Aaron
d’aller trouver le Pharaon et de faire monter du fleuve les grenouilles
qui envahissent tout le pays (deuxième plaie).
3) Sans un
nouvel avertissement, Dieu ordonne à
Moshé et Aaron de transformer la poussière en vermine (troisième plaie).
Le Pharaon refuse d’obéir.
4) Dieu ordonne à Moshé et Aaron
d’aller trouver le Pharaon le matin quand il se dirige vers le fleuve et
demander de renvoyer le peuple d’Israël pour qu’il puise adorer son Dieu. Le
pharaon n’obéit pas. Dieu envoie les bêtes sauvages qui détruisent tout,
sauf le pays de Goshen (quatrième plaie).
5) Dieu ordonne à Moshé et Aaron
d’aller trouver le Pharaon et demander de renvoyer le peuple d’Israël pour
qu’il puise adorer son Dieu. Le pharaon n’obéit pas. Dieu fait périr tout le
bétail des Egyptiens mais pas le bétail du peuple d’Israël (cinquième
plaie).
6) Sans un
nouvel avertissement, Dieu ordonne à
Moshé et Aaron de lancer la cendre vers le ciel et la transforme en éruption
d’ulcères (sixième plaie). Le Pharaon refuse d’obéir.
7) Dieu ordonne à Moshé et
Aaron d’aller trouver le Pharaon le matin quand il se dirige vers le fleuve et
demander de renvoyer le peuple d’Israël pour qu’il puisse adorer son Dieu. Le
Pharaon n’obéit pas. Dieu fait pleuvoir une grêle intense qui détruit
tout, sauf le pays de Goshen. C’est la
septième plaie et c’est la fin du récit pour cette semaine.
Dans ma drasha
il y a deux ans je me suis interrogée sur le comportement du Pharaon. Au sujet
de ses refus répétitifs j’ai émis des hypothèses inspirées par les recherches
en neurosciences. Egalement j’ai posé la question que tout le monde se pose
d’habitude : pourquoi Dieu qui est tout puissant impose les plaies à
l’Egypte au lieu de libérer les hébreux simplement et sans souffrances. En
réponse j’ai cité le commentaire d’Etz Haim, (une publication du mouvement
Masorti): Dieu veut que le Pharaon, l’Egypte, et les nations, le reconnaissent
en tant que Dieu unique mais ce n’est pas pour faire briller sa réputation.
C’est pour démontrer et établir le principe qu’il est inacceptable qu’un être humain réduise un autre être humain à
l’esclavage. C’est pour prouver que la
liberté c’est la volonté de Dieu et non un bon vouloir ou un choix d’un tyran.
Je répète ici ce commentaire car je crois qu’il est d’importance capitale,
mais je ne m’y arrête pas.
Aujourd’hui je souhaite m’interroger sur le comportement de Moshé et Aaron
qui, contrairement au comportement du Pharaon, n’est pas souvent analysé. Au
delà d’une structure littéraire élaborée, nous voyons leur comportement
répétitif : Moshé et Aaron adressent une demande au Pharaon. Le Pharaon
refuse d’accéder à leur demande. Ce refus est suivi d’une punition sans effet.
Moshé et Aaron adressent de nouveau leur demande au Pharaon. Ils se heurtent à
un nouveau refus. Ce nouveau refus est suivi d’une nouvelle punition qui reste
toujours sans effet. Et caetera. 9 fois !
Le comportement de Moshé et Aaron est le plus souvent considéré comme
allant de soi. Ils persévèrent. Ils ne se découragent pas. Ils persistent. Ils
tiennent bon. Ils n’abandonnent pas. Ils ne capitulent pas. Ils sont
exemplaires ! C’est vrai qu’ils ont Dieu avec eux. Mais oublions un
instant l’aide divine car dans nos vies elle n’est pas explicite ; pour
nous la protection et l’aide divine ne sont pas, souvent, faciles à percevoir.
Dans notre vie réelle nous devons parfois faire face à un échec et parfois
cet échec devient répétitif. Nous n’avons pas l’accès direct à l’opinion
divine. Face aux revers successifs, nous nous posons des questions. Nous devons
nous les poser, pour en sortir.
Tout d’abord il est parfois difficile d’établir que notre but soit valable
ou que notre demande soit légitime et d’en être sûr.
Et même quand nous sommes raisonnablement persuadés du bien fondé de notre
objectif, ou de notre requête ou de notre désir, il est parfois difficile de
reconnaître qu’ils sont impossibles à satisfaire. Que les forces en présence,
humaines ou naturelles, soient en notre défaveur. Il est parfois difficile de
ne pas confondre persévérer et s’entêter ; persister et se battre contre
les moulins à vents ; continuer et traîner sur place. Ainsi persévérer
peut conduire parfois à s’enfoncer dans l’échec.
Persister ou abandonner ? Continuer ou arrêter ? De telles
interrogations surviennent dans les circonstances les plus diverses, dans les
relations individuelles - dans la famille, parmi les amis, et dans les
interactions collectives - administratives, commerciales, politiques,
nationales et internationales, …
En conclusion, contrairement à Moshé et à Aaron conduits par la parole
directe de Dieu, nous-mêmes, nous ne pouvons compter que sur ses indices
indirects, discrets et incertains. Ainsi nous restons avec les questions, c’est
souvent difficile mais c’est bien ainsi.
En conclusion, nous sommes guidés par notre expérience, nos conversations,
nos lectures et notre tradition. Mais seulement guidés. Dans la vie les
interrogations, le recul, le doute sont nécessaires et salutaires.
Shabbat
Shalom
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