La
paracha de cette semaine entame et intitule le 3° livre de la Torah, le
Lévitique ou Livre des Lois mais aussi, peut-on dire, de la communication.
Il
y est beaucoup question de parler, dire, d'interpeller, d'échanger, de transmettre,
bref d'appeler dans les deux sens du terme : nommer et héler.
Je
me suis appuyée sur les commentaires de S. R. Hirsch, de Tamar Schwartz –cette
extraordinaire exégète-linguiste qui fait danser et chanter les lettres-, de Y.
Leibovitz, d'A. Chouraki et d'E. Munk eux-mêmes se référant à nos éminents sages
tels que Rachi, à ceux des Pirke Abbot, et à ceux des divers midrachim.
"Il
appela Moïse". Qui est ce Il ? Qui appelle Moïse ? Il n'est
nullement écrit "Hachem, ou Elokhim" appela –ce qui nous
aurait certifié l'origine de l'appel. Non, un simple pronom personnel voulant
peut-être par là nous ramener à cette base fondamentale du judaïsme à savoir
que l'origine nous est et nous sera toujours inconnue, comme le "aleph"
primordial dont nos Sages nous disent de ne pas chercher à analyser ni le haut,
ni le bas, ni les côtés ; ni l'avant, ni l'après.
C'est
un appel de l'Infini, une assignation nous appelant infiniment. Ainsi, à
l'instar de Moïse convoqué nommément par Dieu, nous le sommes personnellement chacun
dans notre propre subjectivité, lors de l'étude de la Torah, à la fois dans la
fierté d'avoir été choisis, désignés par Dieu, mais aussi, dans une profonde modestie….. car
nous ne sommes que brin d'herbe.
Cette
double attitude, d'honneur et d'humilité face à un appel, est mise en relief
par l'écriture même du Texte : en effet, ce mot "vahikra"
comporte, en lettre finale, un "aleph" mais plus petite que
les autres lettres. C'est Moïse, raconte-t'on qui, in fine en aurait décidé
ainsi : d'une part, il ne peut dénier son
authentique reconnaissance envers Celui qui l'a désiré, désigné mais
d'autre part, il ne peut faire violence à sa légendaire modestie face au choix
irrévocable de Dieu. Alors, sensible au fait qu'il est invité par Dieu à venir le rejoindre en
l'appelant par son prénom –marque de la proximité existant entre eux-, il
accepte une fois de plus sa mission mais la transcrit avec un modeste "aleph".
On
voit bien que cette paracha est placée
sous le signe du "rapport", du "rapprochement" entre la
transcendance et l'humanité. Que ce soit par la parole ou par l'offrande, le korban
–bâti sur les consonnes "kouf/rech/bet", le lien entre le Haut
et le Bas s'actualise dans des actes.
Nous
sont alors énoncées les lois –très minutieuses- s'appliquant aux
"sacrifices", terme français qui traduit mal cette notion de "proximité"
dont il est question avec les offrandes apportées dans ce lieu qui deviendra
plus tard le Temple et qu'ici, dans le désert, se nomme "Tente d'Assignation",
lieu d'où dorénavant la parole divine sera entendue par le seul Moïse,
le
plus grand des prophètes afin qu'il la pratique avec justice et surtout, la
transmette au peuple.
Car
Moïse cette fois-ci se voit confier une mission particulière, celle qui sans
doute était contenue dans les deux précédentes : celle de former la nation à sa
vocation première, de faire des bnei
Israel, un peuple de prêtres accomplissant scrupuleusement les rites sacrificiels mais
avec pour tache aussi, d'y joindre les offrandes des autres peuples. Car n'oublions pas, le Temple a valeur
universelle : Isaïe : "…leurs holocaustes seront les bienvenus sur mon
autel ; car ma main sera nommée Maison de Prières pour toutes les nations".
En
outre, il convient de noter, que la voix de Dieu ne se fait pas entendre
n'importe où.
Le
lieu de la rencontre entre Dieu et l'Adam exige un travail +/- inconscient, +/-
maitrisé, +/- ritualisé. Et même si le
lieu est dit "Tente d'Assignation" et donc qu'il est matériel,
il faut avoir présent à l'esprit que la Révélation ne peut s'effectuer que si
l'Adam est prêt, c'est-à-dire lorsqu' en position de kabala, il reçoit, dans
un creux matriciel fécond, la parole divine. Car même si elle parait venir de
l'extérieur, d'en haut, la Voix dépend de la place qui lui a été préparée, dans
l'intériorité de chacun. C'est dans cet
"entre-deux" semblable à celui qui reliait les deux chérubins
protégeant l'Arche d'Alliance, que réside la Révélation, c'est-à-dire l'écoute
de l'Autre, de la Transcendance.
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